Puisant son énergie en Colombie, ce 4e album raccompagne le groupe Labess jusqu’à sa terre natale, l’Algérie. Le chaâbi remonte à la surface pour chanter Yemma (maman). Comme un retour à la terre mère, l’auteur-compositeur Nedjim Bouizzoul nous offre là le son profond d’une intime maturité.
L’aventure commence en Colombie, en 2017. Nedjim Bouizzoul, auteur-compositeur du groupe Labess se trouve alors en résidence de création à Barran Quilla. Ce qu’il écoute le fascine, il doit revenir. À l’écoute, le directeur de l’alliance française Philippe Mouchet lui présente de grands musiciens cubains
et colom biens. Avec la « Banda de Barranquilla », Nedjim monte un groupe et tourne dans toute la Colombie. Il vibrera pendant deux ans sur cette terre latine. Imprégné de rumba et de cumbia, l’auteur composteur s’envole pour la France. Pour l’artiste, l’inspiration sort souvent la nuit. Après. À l’écart de la lumière. L’année 2020 lui offre cette intimité et l’expérience inédite de retrouver à distance cette énergie colombienne vécue avec ses compagnons de musique. L’album est enregistré entre la France et la Colombie, grâce à Simon Demouveaux qui a arrangé et co-réalisé « Yemma ».
Ce voyage rétrospectif entraine Nedjim plus loin qu’il le pensait… Très loin même, jusqu’à sa terre natale, l’Algérie. Jusqu’à ses origines, sa maman. Sur la route de l’exil, l’artiste se trouve à un point charnière. 18 ans passés en Algérie et 18 ans passés sur la route. Durant l’été 2020 il retourne à Montréal, sa première terre d’accueil, pour rendre visite à sa mère. Et enfin, la chanson sort. Celle qu’il voulait lui écrire depuis si longtemps. Yemma. Hommage à sa maman. Le courage d’une jeune veuve de 34 ans, qui s’est battue pour couver, nourrir, habiller, emporter ses enfants au loin, vers un avenir plus prometteur. Tant qu’à faire, Nedjim lui dédie tout l’album. « Comme à tant de femmes qui sont dans l’ombre ». Et tout naturellement le chaâbi reprend de la force, au son de la man dole, du banjo, comme pour souffler le parfum d’Alger, celui de l’enfance. Et célébrer le courage des mères du monde entier. Inexorable. Terres et voix à l’unisson.
Dans ce nouvel album, 14 titres s’enchainent comme dans les fêtes, entrainés par le chaâbi. Avec quelques surprises, notamment Dance Me la première chanson en anglais de Labess, reprise inédite de Léonard Cohen qui a inspiré à Nedjim Bouizzoul l’écriture de deux couplets en algérien. Des reprises des grands maîtres Cheikh Amar Ezzahi et El Badji, comme l Meknine ezzine, écho au confinement, qui évoque la prison, l’oiseau en cage qui chante la liberté perdue. Labess reprend une chanson traditionnelle colombienne Se Quema El Monte, qui suggère à celui qui l’écoute la chose suivante : « si la mon tagne brûle, laissez-la, elle finira par renaître ». Hiddan a Daj est une composition personnelle jouée d’une manière traditionnelle. Et Clovis, une chanson en hommage à son ami décédé, Clovis Cruchet, luthier qui a appris à Nedjim l’art de confectionner ses propres guitares. Avec Manon, l’auteur s’adresse à la mère de son enfant. La vida es un carnaval, a été co-écrite avec Gabriel De Villeneuve tout en poésie, pour une invitation à la fête. Mélange de rumba lente et de chaâbi, Lampedusa rend
hommage aux per sonnes qui traversent sur les bateaux de fortune. Nedjim Bouizzoul a écrit et composé cette chanson pour un film qui n!est jamais sorti. Elle est dédicacée à Najib Abid, réalisateur tunisien qui s’est vu dérober et censurer son reportage réalisé sur 300 migrants disparus lors de la révolution tunisienne. Autre singularité dans le chaâbi de Labess, la voix féminine de Malia Saadi s’invite avec douceur dans cet album rare. Yemma est l’alchimie musicale de talents algériens, colombiens, et autres compagnons de route de Nedjim Bouizzoul : Pierre Bonnet à la basse, Mike Rajamahendra à la batterie, François Taillefer aux percussions, Lauran Bozic au violon, Mohamed Abdenour au mandore et banjo, Bastien Charlery et Miche Moli na à l’accordéon, Javier Eduardo Villa Padilla aux cuivres (trompette, saxophone et trombone), Moises Marquez Leyva au saxophone, Rafael Cavilan Cana alias « Pachalo » aux trompettes et percussions et Agathe Marie dit Dinard au chant.
Tous et toutes rassemblé(e)s autour de musiques cousines, chansons et poésies populaires reliées au cœur des hommes et des femmes, à la terre mère.